Cinquième coup

 

Estoc d’hault

5.1 Tenue et garde (fig.45-46)


Les gardes :

Le lieutenant :

«Sensuit la tenue & garde pour le Lieutenent assaillant, & pour le Prevost deffendant, pour executer, & tirer un estoc d’haut, pour le cinquiesme coup.

Et pour ce faire, ce Lieutenent estant à pied joint comme est dit à un desdits premiers plans, fault pour bien faire ceste premiere garde basse, qu’il tire le pied droit arriere, en desgainant l’espée, & porter la garde d’icelle droit le giron gauche, le tranchant en bas, assituant la pointe droit la braye ou à peu-pres, tenant aussi sa main gauche droit son tetin : comme est monstré cy dessus à la prochaine pourtraiture dudit Lieutenent, cotté en chiffre au derriere du haut de son collet, 45.»


Garde basse sur la démarche du pied gauche.


Le prévôt :


«Et pour ce faire, cedit Prevost estant aussi à pied joint pour faire ceste susdite garde & tenue, faut qu’il tire le pied droit arriere, & face un desdits trois desgainemens, & porte la garde de l’espée, un peu plus haut que l’espaulle droite, & soy mettant en garde haute, tenant la main que tient l’espée le dessus d’icelle en haut, assituant la pointe de l’espée à la bouche dudit Lieutenent, tenant aussi sa main gauche droit la poictrine : comme est monstré & se peult voir cy dessus à sadite pourtraiture cotté en chiffre, 46.»


Garde haute, démarche su pied gauche.


5.2 Estoc d’hault (fig.47-48)

Le lieutenant :



«[...] Et pour ce faire, faut que ce prochain Lieutenent estant sur le pied gauche : comme est cotté cy dessus à l’autre pourtraiture en chiffre 45. advancer le pied droit, & tirer un estoc au tetin gauche du Prevost, tournant la garde de l’espée les ongles en hault, & la main gauche droit son visaige : comme est monstré appertement tout ce que est dit par cest escript à sadicte pourtraiture, cotté en chiffre au derriere du sommet de sa teste, 47.»


Le lieutenant porte un estoc à la poitrine du prévôt. C’est la première fois que ce coup est utilisé autrement qu’en feinte. Le manière dont le lieutenant porte l’estoc mérite qu’on s’y arrête. Il est donc en garde basse la lame est verticale, et avance pour porter l’estoc en « tournant la garde de l’espée les ongles en hault». Personnellement j’aurais tendance à ne pas tourner l’épée ou à la tourner dans l’autre sens, les ongles en bas. La vrille du bras consécutive à la rotation pour amener les ongles en haut ne m’est pas très confortable. Je me sens un peu coincé et moins disponible pour transformer le mouvement en parade de tierce face à un gaucher par exemple.


Tests : testons les trois possibilités sur un pas et sur la démarche du pied gauche en garde basse.

  1. 1.rotation pour arriver en supination

  2. 2.pas de rotation la lame reste verticale

  3. 3.rotation pour arriver en pronation


Il a raison le bougre comme aurait dit feu maître Capello.


  1. 1.La première façon conduit à une impression de bras figé et produit une rotation du bassin façon escrime moderne. Le bras gauche est du coup moins disponible pour parer la pointe adverse. De plus j’ai personnellement moins de précision en estoc. Je pense que cette solution n’est pas dans l’esprit de Saint Didier. De plus la main a tendance à s’carter vers la droite surtout si on n’adopte pas la prise à l’Italienne comme semblent le montrer les dessins. Le centre est donc à découvert.

  2. 2.La deuxième façon me plait bien

  3. 3.La troisième façon, celle préconisée par Saint Didier, demande un peu plus de souplesse du bras, la prise de l’arme ayant tendance à faiblir. Le centre est bien protégé même sans la prise à l’Italienne.



Dans cette vidéo la prise est à l’Italienne


Dans les deux derniers cas le bassin pivote peu et la main gauche reste plus facilement en avant pour parer la pointe adverse. La précision est bonne. J’aurais tendance à préférer la deuxième solution car je sens plus de précision mais le centre est moins bien protégé qu’avec la troisième solution. Il y a un autre facteur à prendre en compte : la parade du prévôt. En effet le prévôt va parer de quarte.


  1. Solution d’estoc n°2 : le plat de l’arme reçoit la parade.

  2. Solution d’estoc n°3 : le tranchant de l’arme reçoit la parade.


Je subodore un problème de vibration de l’arme avec une réception de la parade sur le plat. Comment vérifier cela sans avoir des répliques précises des armes d’époque. Ma side sword a une lame qui a une certaine souplesse.


Le prévôt :


«[...] Et pour ce faire, faut que ledit Prevost estant sur le pied droit, tire le pied gauche arriere, & rabate & croise l’espée dudit Lieutenent de la sienne, du fort le foible, c’est à dire, d’aupres de la garde, au millieu, un peu plus haut vers la pointe de l’espée, les ongles52 en hault, presentant un estoc audit Lieutenent droit son visage, tenant ledit Prevost sa main gauche droit son tetin gauche, comme le tout est monstré cy dessus à sa pourtraiture & figure cotté en chiffre, 48, et si ledit Prevost est gaucher, faut que ledit Lieutenant droiturier luy tire cest estoc, advançant le pied droit arriere, & croisera l’espée dudit Lieutenent, du fort le foible, comme se pourra voir par exemple & praticque contre un gaucher : bien est vray, que si le Prevost est gaucher, ledit Lieutenent ou autre se doit adapter au Prevost gaucher à la demonstration, c’est à dire, qu’il se doit faire gaucher, & faire la desmarche premiere estant à pied joint, & tirer le pied gauche sur la semelle cotté aux premieres pourtraitures, 4, & laisser la semelle ou est cotté, 1, vaccue53 comme se peult voir & en son lieu.»


Le prévôt pare en quarte. Là justement Saint Didier fait allusion au problème d’un prévôt gaucher. Il n’est pas très clair. Il semble que le lieutenant ne change rien à son attaque, ni le prévôt; cependant Saint Didier suggère qu’on voit les adaptations à la pratique, notamment tout inverser. Puis il passe à l’aspect pédagogique où il dit que si le prévôt est gaucher, le lieutenant doit se faire gaucher pour bien lui enseigner.


5.3 Première opposite & suite (fig.49-50)


Le lieutenant :

«Et pour ce faire, faut que cedit Lieutenent estant sur la desmarche du pied droit pour faire ceste presente opposite & suitte un peu de temps apres qu’il a eu tiré ledit estoc cinquiesme coup sur le maindroit, a ledit Lieutenent desrobé son espee par dessous la garde de l’espée du Prevost, & a tiré cedit present Lieutenent, pour la premiere opposite & suitte un autre sur le renvers, qui est sur le costé droit du Prevost, tenant la main gauche droit le tetin : comme est monstré cy dessus à sa pourtraiture & figure, cotté en chiffre, 49, Et si ledit Lieutenent est gaucher, faut qu’il tire les coups tout à l’opposite de ce qu’a esté tiré cy dessus, tant de la desmarche que ladite opposite & suitte, c’est à dire, que si ledit Lieutenent tiroit un renvers estant droiturier, faudroit que le Prevost s’il estoit gaucher le rabatit d’un maindroit de la main gauche.»


Le coup a la même structure que pour une attaque maindroit suivie d’un revers vue précédemment. Le lieutenant dérobe son épée par en dessous et porte un estoc sur le côté droit du prévôt. Je suppose que les ongles restent en haut ce qui me paraît logique.


De nouveau une allusion à un lieutenant ou un prévôt gaucher. Il faut tout inverser : démarche et coups pour le lieutenant. Ici Saint Didier précise ce qui était pressenti à l’estoc précédent : le prévôt gaucher pare l’estoc du lieutenant droitier d’un maindroit. Je le comprends comme rabattre l’épée du lieutenant d’une parade de quarte de la main gauche. Du coup le «maindroit» serait plutôt un «maingauche».


Le prévôt :


«Et pour ce faire, ledit Prevost estant aussi sur le pied droit, ledit Lieutenent voudra desrober son espée pour luy tirer ceste premiere opposite qui est un estoc d’hault sur le costé droit, cedit Prevost voyant ce, estant sur ledit pied droit a croisé de son espée celle dudit Lieutenent du fort le foible, tenant la main que tient l’espée le dessus de la main en haut, & luy a presenté un estoc à la gorge, tenant la main gauche droit son tetin gauche : comme est monstre cy dessus à sa pourtraiture & figure cotté en chiffre, 50.»


Parade de tierce comme aux coups précédents. Je en vois aucune nouveauté si ce n’est que cette fois c’est un estoc qui est paré ainsi.


5.4 Seconde opposite & suite (fig.51-52)


Le lieutenant :

«Pour declarer, & bien donner à entendre ceste dite seconde opposite & suitte pour ledit prochain Lieutenent, faut qu’iceluy soit sur la desmarche du pied droit, comme il estoit quand il a tiré ledit estoc cinquiesme coup d’hault, passant son espée en la desrobant sur un ariere-main par desoubs la garde de l’espée du Prevost, & à un instant ledit Lieutenent pour ceste seconde suitte tirera encores un estoc ou maindroit d’hault à son chois sur le costé gauche du Prevost deffendeur, tenant la main que tient l’espée le dessus d’icelle en bas, & les ongles en hault, & la main gauche la tenant droit son tetin : comme est monstré cy dessus à sa pourtraiture & figure cotté en chiffre, 51.»


Saint Didier commence par résumer les actions précédent cette seconde opposite et parle «d’arrière-main» en lieu de l’estoc décrit comme seconde action du lieutenant. Puis il enchaîne sur l’action de seconte opposite proprement dite qui est un estoc OU maindroit (au choix) après la dérobade de l’épée. En fait il semble que le lieutenant puisse choisir entre estoc ou taille dans ces coups sans doute pour entraîner le prévôt à parer l’un ou l’autre en s’adaptant à la situation.


Le prévôt :


«Et pour ce faire, est besoin que ledit Prevost, estant sur la desmarche du pied droit, croise & rabate l’espée dudit Lieutenent assaillant, du fort le foible, sur un maindroit autrement appellé avant-main, & par ce moyen deffendra & evitera ledit Prevost ladite seconde opposite & suitte, tirée cy dessus par ledit Lieutenent, & tout cela fait presentera ledit Prevost un estoc au visaige dudit Lieutenent, tenant la garde de son espee les ongles de la main que tient icelle en hault, & la main gauche droit le tetin gauche, comme est monstré cy dessus à sadite prochaine pourtraiture, cotté en chiffre au derriere de son cappeau, 52.»


Parade de quarte sur l’action du lieutenant qu’elle soit un maindroit ou un estoc, avec présentation d’un estoc au visage comme précédemment. Au passge Saint Didier précise que maindroit et avant-main sont la même action.


5.5 Remarques


La nouveauté de ce coup est l’introduction d’attaques en estoc sur le côté du maindroit ou du revers. Aussi, le lieutenant peut mélanger des attaques en estoc ou en taille à sa guise. On semble progresser vers des techniques un peu plus libres; un peu moins codifiées.

 
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Cinquième coup

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