Second coup

 

Revers au jarret

2.1 Tenue et garde (fig.21-22)


« Pour bien faire cestedite garde pour le lieutenent faut qu'il soit à pied joinct … pour ledit Lieutenent est besoin … qu'il tire le pied droict arriere un peu à cartier sus le costé droict, & à mesme temps mettre l'espée au poing, portant la garde de l'espée un peu plus haute que l'espaulle droicte qui est en garde haute, assituant la pointe de l'espée droict à la veue, tenant sa main gauche sus la cuisse gauche … »

Comme au premier coup, le lieutenant est à pied joint et dégaine son épée en tirant le pied droit en arrière et sur le côté droit. Il se positionne en garde haute, la pointe dirigée vers les yeux du prévôt. Comme sur les images du premier coup, il y a une erreur du peintre et la main de l’épée doit être ongles en bas et non ongles vers le haut.

« … ledit Prevost estant pareillement à pied joinct … faut pour bien faire ceste garde basse que ledit Prevost tire le pied droict arriere en desgainant, portant la garde de l'espée sus son giron gauche, assituant la pointe le l'espée droict à la braye dudit Lieutenent, tenant aussi la main gauche droit le tetin gauche … »

Le prévôt, tirant le pied droit en arrière, dégaine et se positionne en garde basse, la pointe de son épée visant le niveau de la ceinture.

2.2 L'attaque et la défense (fig.23-24)


« Et pour ce faire, ledit Lieutenent estant sur le pied droict ayant faict & tiré ladite première & seconde opposite, & pour executer & faire cedit second coup advance le pied gauche, & tire un arriere main au jarret droict du Prevost … »

Après le dégainement, le lieutenant se trouve le pied droit en arrière, en garde haute avec le pied gauche devant. Or le texte dit « étant sur le pied droit », il avance le gauche pour attaquer. C’est comme s’il manquait quelque chose. Justement le texte précise « ayant faict & tiré ladite première & seconde opposite ». Mais que sont ces première et seconde opposite ? Saint Didier veut-il dire par là que l'on enchaîne le second coup avec le premier coup, en effet ayant finit la première et la seconde opposite du premier coup, les deux tireurs se trouvent pied droit devant. Cependant, dans ce cas,  ils ne sont pas à la bonne distance pour enchaîner le second coup. Ils doivent reculer en restant sur le pied droit (retraite dans le jargon de l’escrime moderne). Dans ce cas les dégainements sont inutiles. Jean-François Gilles dans son cahier d’étude envisage diverses solutions d’attaques composées comme une feinte d'estoc au visage suivit d'un revers à l'épaule ou une feinte d'estoc au coeur suivit d'un estoc sur le revers en se basant sur le fait que Saint Didier, au début du sixième coup (fig. 53-54), écrit : «on le pourroit commencer à tirer sur le pied gauche, mais faudroit multiplier les coups, ou les executer auec vne fainte».

Suit une nouvelle allusion à la situation d’enseignement.

«cedit lieutenent feint de ne scavoir le remede de cedit revers, mais il le fcait comme se verra cy apres : car il ne veult deffendre, ne faire de remede, attendu qu’il montre audit prevost comment il doit faire

Puis on passe à la défense :

« … ledict Prevot … estant sur le pied gauche … quand ledit Lieutenent a advancé le pied gauche pour luy tirer un arriere main de bas au jarret, le Prevost a tiré le pied droict arriere, & a tiré un revers sur le coude du bras de l'espée dudit Lieutenent, & n'est allé à l'espée comme font vn tas dignorans … »

Le même problème se pose ici : le prévôt est en garde pied gauche devant et le lieutenant lui attaque la jambe droite qui est la cible la plus éloignée, et malgré tout il est sensé reculer le pied droit (?). L’image 24 montre le prévôt sur le pied gauche exécutant le revers sur le coude armé du lieutenant. Il devait être sur le pied droit avant l’action. Ce coup semble être le symétrique du premier coup mais sur le pied droit. Dans ce cas les dégainements semblent incongrus. A la fin du paragraphe, Saint Didier insiste à nouveau sur le fait de parer inutilement au lieu de toucher.

2.3 La première opposite et suite (fig.25-26)


« … ledit Lieutenent estant sur le pied gauche, se voyant touché sur le coude du bras de son espée … incontinent se prochain Lieutenent a faict ceste premiere opposite, ou suitte, & est remonté d'un maindroict, ou estoc d'hault comme il pouuoit … »

La situation est analogue à la première opposite & suite du premier coup (cf. 1.3). Voyant la contre-attaque du prévôt, le lieutenant remonte vivement la main de l'épée pour ôter son bras de la trajectoire de l'épée du prévôt, puis il frappe d'un maindroit ou d'un estoc. Notons que toute l'action se fait de pied ferme avec le pied gauche devant (cf. 2.2), il est précisé que: « ledit Lieutenent estant sur le pied gauche … ».

Cependant, ce n’est pas si simple. Si le lieutenant dérobe son épée par la droite, alors il ne la monte pas : il la descend dans un mouvement circulaire avant de la remonter à l’épaule pour le maindroit, ou de l’armer à la ceinture ou à la poitrine pour l’estoc. Et dans ce dernier cas ce mouvement d’armer doit être suffisant pour éviter que l’épée ne soit heurtée par celle du prévôt, ce qui pourrait l’arrêter dans sa course.

« … est necessaire que ledict Prevost estant sur la demarche du pié gauche, il croise de son espée celle dudict Lieutenent, du fort le foible, & luy presenter un estoc au visaige dudit Lieutenent, tenant la garde de l’espee les ongles de la main d’icelle en hault & la main gauche en dessoubs du bras de l’espee … »

Le prévôt reste lui aussi de pied ferme avec le pied gauche devant (cf. 2.2), il fait une parade de quarte (ongle vers le haut) et présente un estoc au visage du lieutenant dans cette position de main. C’est donc en gardant cette position de main et lame à plat que le prévôt pousse son estoc. Mais ici encore le prévôt ne fait que menacer (cf. 1.3).

2.4. La seconde opposite et suite (fig.27-28)


« … le Lieutenent susdict estant sur la démarche du pied droict desrobera son espée par desoubs la garde de l'espée du Prevost, & tirera encores un revers ou estoc d'hault […] suitte à son chois sus le costé droict, tenant la garde de son espée ses ongles regardant du costé gauche, & la main gauche droict son visaige...»

Pour finir l'exercice (cf. 1.4), le lieutenant dérobe son épée et tire un revers à l'épaule droite ou un estoc à la poitrine droite du prévôt. Ici encore nous avons un problème de placement de pied : comment peut-il être sur la démarche du pied droit alors qu'il était sur la démarche du pied gauche précédemment ? De plus, on peut observer sur la figure qu'il a le pied gauche devant, comme pour la première opposite & suite. De plus, Saint Didier ne mentionne aucun déplacement. On peut émettre l'hypothèse d'une erreur commise lors de la composition du livre. Signalons que pour tous les autres coups, la première opposite & suite et la seconde se font de pied ferme. En conclusion on peut laisser le lieutenant sur la démarche du pied gauche et lui faire exécuter cette opposite & suite de pied ferme.

« Et pour ce faire est besoing que ledict Prevost soit aussi sus le pied droict & qu'il croise & rabbate du fort le foible, l'espée dudit Lieutenent … & luy presenter un estoc au tetin gauche … »

Même problème : comment le prévôt peut il être sur la démarche du pied droit alors que sur la gravure nous le voyons sur celle du pied gauche ? Soit le prévôt fait un déplacement qui n'est pas indiqué dans le texte. Soit il s'agit d'une erreur (deux erreurs consécutives ?) et alors le prévôt exécute la seconde opposite & suite de pied ferme avec le pied gauche devant, comme sur la gravure. De toute façon le prévôt fait une parade de tierce (seconde haute en cas d’estoc ?) et présente un estoc à la poitrine du lieutenant. Pour finir, Saint Didier dit que si l’un des deux tireurs est gaucher, il faut «qu’ils observent la mesme des sussdite demarche garde &assituations...».

Vidéo du second coup de l’épée seule de Henry de Saint Didier.


2.5 Remarques et questions

Malgré les problèmes rencontrés dans l’interprétation du texte, la situation du deuxième coup semble symétrique à celle du premier coup mais sur le pied droit.

  1. Pourquoi attaquer le jarret alors que le prévôt à son épée visant la braie et donc prête à parer en bas ? Je dirais pour permettre au prévôt de tester un contre rapide et efficace. Encore le contexte d’enseignement ?

  2. Saint Didier propose de reculer le pied droit et d’attaquer le bras en revers sur l’extérieur du bras de lieutenant (coude). Cela ressemble à une parade en octave. Nous avons rencontré des problèmes de distance. Si le prévôt veut mettre sa jambe en sécurité il se retrouve rapidement hors distance. Au mieux il touche au poignet, difficilement au coude.


2.6 Conclusion

L’interprétation de ce coup est troublée par les problèmes de démarches rencontrés à plusieurs reprises dans le texte. A la fin j’ai choisi de considérer ce deuxième coup comme le symétrique du premier sur l’autre démarche. Malgré tout je reste insatisfait car j’ai l’impression qu’il y a trop «d’erreurs», comme s’il y avait des subtilités que j’ai manquées.

 
Premier coupPremier_coup.html

Second coup

Troisième coupTroisieme_coup.html

Quatrième coup

Quatrième coupQuatrieme_coup.html
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Cinquième coupCinqieme_coup.html
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